• Aux auteurs qui ont envoyé un manuscrit aux éditions

     

    Lettre à l'attention des auteurs ayant envoyé un manuscrit/tapuscrit

    aux éditions la Boucherie litteraire

     

     Lettre aux auteurs qui ont envoyé un manuscrit aux éditions

     

    Courrier écrit lors du confinement.

     

    Chères & chers poètes,

    Le confinement n'est pas encore pour moi un temps béni pour me confiner en lectures et autres bienfaits qu'il pourrait m'apporter. Certe, je trouve enfin une partie du temps pour me reposer, mais l'essentiel de l'autre est à chercher à garder la tête hors de l'eau.

    Mais avant le confinement, j'ai pris le parti de réunir tous les tapuscrits en attente.
    Certains auteurs savent que je ne suis pas de ceux qui lisent vite, que ce soit des tapuscrits envoyés de leur propre chef ou d'autres que j'ai moi-même demandé à lire.

    S'il n'y a pas de recette pour écrire de la poésie il n'y en a pas non plus pour être éditeur de poésie.
    Chacun fait sa cuisine comme il peut.

    Pour ma part, j'ai fais le choix d'une économie qui ne repose pas sur la nouveauté, mais le maintien de textes disponibles en librairie. Pour cela, je prends aussi souvent que possible la route pour aller à la rencontre des libraires, tout comme des maisons de la poésie ou encore d'organisateurs d'évènements littéraires. Ce sont des périodes intenses dont les journées sont très longues et les nuits courtes. L'épuisement est constant, les sorties de routes palpables et les rares moments de libres je les consacre à récupérer autant que possible. Quand je suis sur la route, même l'ordi à portée de main, je n'ai pas le temps de me consacrer aux autres tâches que confèrent le métier d'éditeur. Bref, je ne peux être ni au four ni ou moulin surtout quand mille bornes les séparent.

    Ainsi, mes temps consacrés à la lecture de poésie sont finalement rares et ceux de tapuscrits reçus d'autant plus rares. Et ceux envoyés en numériques pour ainsi dire nul. L'ordi est un outil de travail, je passe un temps inconsidéré devant l'écran, aussi plus vite je l'éteins, mieux je me porte.

    Ces lectures de tapuscrits ne relèvent pas pour ma part du plaisir, mais d'un travail. Un travail laborieux. Un travail où je continue à rester négativement stupéfait par ce que je reçois. Rien de nouveau sous le soleil, j'ai l'impression que la plupart des poètes n'ont aucune idée de mon catalogue, mais qu'importe on envoie quand même. L'art de faire perdre le temps à tout le monde.
    Je ne vous dis pas merci.
    Aux auteurs qui n'ont aucune considération pour ce que je publie ni pour mon temps, je ne prends pas la peine de répondre comme eux n'ont pas pris la peine de connaître ma ligne éditoriale. On récolte ce que l'on sème à tout vent.

    Finalement, c'est un travail plus souvent désagréable que l'inverse. Parfois, une lecture touche parfois une autre me chamboule, c'est bien le but me direz-vous.
    Le texte sort alors du lot, mais il n'est pas pour autant un texte publiable.
    Je me méfie de mes états de lectures. Si je suis bien ce que je lirais pourrait l'être et inversement. Je me donne donc le temps de lire des textes dans différents contextes.
    Ainsi, une année ou deux peuvent s'écouler avant que je me décide enfin à porter un texte. Car il s'agit bien de ça. Je publie et porte des textes, des textes que les auteurs parfois ne portent pas ou plus, je les présente aux libraires en leur rappelant que la notion de nouveauté n'existe pas en poésie, que les livres publiés sont des ouvrages de fonds. Qu'un texte ait été publié il y a 2 mois, 3 ans ou 5 ans, face aux libraires il est défendu comme s'il avait été publié la veille.

    Certains qui m'ont croisé lors de mes tournées de diffusion, vous diront que j'ai toujours avec moi des tapuscrits.
    Je les garde au frais, dans une glacière.
    Il peut s'écouler 3 semaines de tournée harassante ou ma seule envie est de fuir la poésie et où j'arrive à lire 2 à 5 pages (frustration) de polar tous les 2-3 jours. Je dors rarement 2 nuits au même endroit. Quand 48h se profilent alors je vais parfois picorer dans la glacière. Certains auteurs dont la lecture est en cours le savent, je leur envoi des photos de leur tapuscrit mis en situation selon l'environnement dans lequel je suis.
    ...
    Malgré la prévenance sur le blog des éditions de ne pas m'envoyer de tapuscrit avant l'automne 2020 (repoussé depuis peu à janvier 2021), rien n'y fait, les tapuscrits envahissent la boîte aux lettres. Difficile de ne pas associer ces vagues de mots et de papiers à un manque de respect.
    Alors si le temps me le permet, si je trouve des solutions pour garder les éditions à flot et que la reprise se profile comme un chance de sauver ce qui peut être sauvable, je m'attelerai à lecture du tsunami de tapuscrits reçu jusqu'à ce jour.
    Mais avant ça, avant que je ne plonge dans vos écrits, merci de me faire gagner du temps, et celui des autres, en me disant si votre tapuscrit a trouvé entre temps un éditeur ou est en court de publication ou s'il ne vous correspond plus et que vous voudriez le retravailler.

    Sachez, pour vous donner une petite idée de ce que représentent ces enveloppes que j'ai pris en photo ce matin : si je publiais chacun de ces textes, au prorata de ce que j'ai publié ces 5 dernières années, cela représenterait 22,5 ans de publications !
    Naturellement, je ne suis pas prêt pour ça.


    N'hésitez pas à relayer ce message afin que les poètes en lien avec vous puissent avoir accès à cette missive. Merci à toutes celles et ceux qui relieront cet article.

    Bon confinement à tous. N'écrivez pas trop. Acceptez que tout ne soit pas publiable. Épargnez-moi vos écrits confinés.
    Et rappelez-vous humblement qu'une poignée de poètes seulement traverseront les siècles.