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    Un grand merci à Jean-Pascal Dubost pour sa chronique parue dans Poezibao le 18 mars 2016.

    Jean-Pascal Dubost pour ceux qui ne le connaîtrait pas, est un poète français né en 1963 à Caen. Il vit dans l'Ille-et-Vilaine, dans la forêt de Brocéliande.

    Il publie des articles et critiques littéraires dans les revues Europe, Cahier Critique de Poésie, Gare Maritime. Il est l'un des collaborateurs du site de poésie Poezibao (actualité de la poésie contemporaine).

    Il a collaboré à l'activité de la Maison de la Poésie de Nantes, dont il a été le président de 2007 à 2011.

     

    "Maison" d'Emanuel Campo sous l'œil acéré de Jean-Pascal DubostLa Boucherie littéraire est une toute nouvelle maison d’édition de poésie, sise dans le Luberon, qui vient de publier une salve de quatre poètes1, ce qu’il faut saluer, car il n’est pas que des disparitions à déplorer, dans le milieu de la poésie, mais aussi et surtout des créations à soutenir. D’autant saluer, cette généreuse entreprise, qu’elle prend le risque de publier le premier livre d’un jeune poète de 32 ans, Emanuel Campo, Français et Suédois, poète pluri-disciplinaire (performer, interprète, musicien, scène théâtrale, spoken word etc.) Il est entendu que la jeunesse ne fait pas la qualité d’un livre, n’est pas Rimbaud n’importe quel quidam au prétexte d’une jeunesse d’artères. Il se trouve que la jeunesse de ce poète apporte une bouffée d’insolence à la poésie, ce qu’il faut signaler. Les poèmes, contrairement à ce que supposerait le sous-titre, n’appartiennent pas à une poésie du quotidien, au sens d’un relevé des faits du quotidien, sur le mode réaliste et neutre, ou néo-réaliste. Si la poésie d’Emanuel Campo est de quelque lignée, nous pourrions citer Tristan Corbière, Roger Lahu, Richard Brautigan, Charles Bukowski et Ian Monk, sur le registre de l’humour tantôt, à tonalité d’auto-dérision. Titre et sous-titre en eux-mêmes ouvrent la porte sur l’humour, un humour tautologique, pour leur cas, puisque le mot « domestique » est, étymologiquement, domesticus, « de la maison », autrement dit lire : « Maison, poésies de la maison », donc. Petite entrée en la matière d’humour, subtilement. Sur ce registre, Emanuel Campo nous ouvre la porte de sa maison, tantôt en rire jaune (Corbière), tantôt en humour décalé décapant presque absurde (Brautigan et Lahu), tantôt en humour noir (Bukowski), humour cruel quelques fois (Ian Monk). La patte de Campo, la personnalité d’écriture sienne, est l’assimilation des pères et phares qui font la sienne, insolente. Pas de grandes révélations sur le monde, on le sait rapidement, dès le deuxième poème :

    « Quand j’étais petit,
    je croyais que la bande de Gaza
    c’était un groupe de rock. »

    C’est affiché et clair, le monde est loin, même s’il est dans tous les gestes quotidiens, il est mis à distance par la dérision la plus totale comme dans le poème « Petit  pot, couches et discussion à propos d’économie », où après avoir effectué un tour de planète en l’espace de quelques gestes de la vie domestique :

    « et maintenant mon enfant,
    que vas-tu faire de toute cette mondialisation qui arrive aux portes de ta bouche ?
    À mon fils de 11 mois de répondre :
    ― Perso, j’en sais rien. Sûrement tout manger. Pose plutôt la question aux fabricants de couches qui tirent profit de toute cette merde. »
     
    Le sarcasme n’épargne personne, pas même l’interlocutrice des poèmes, compagne fictive ou réelle :

    « Tu me dis que tu aimes bien la poésie.
    En particulier ces courts poèmes japonais
    Les sudokus.

    Il y a de tout pour ne pas faire un monde, un macrocosme, du sudoku, donc, mais aussi du MMS, SMS, de la pub pour une revue de poésie, un atelier d’écriture, un flash mob, du streaming, du spasfon, des choses qu’on ne trouve pas a priori dans la poésie des poètes du grand vingtième, choses de la vie quotidienne, choses de la vie ordinaire, qui ne font pas rêver, d’un jeune homme sans illusions sur le monde et qui se rattrape en y mêlant des piments humours.
    La poésie, dans son extrême-contemporanéité ambiguë, n’est pas épargnée : « Je viens de rentrer d’une lecture/ça manquait de poil/une lecture organisée par une revue de poésie/ça manquait de poil/c’était marqué PERFORMANCE/ça manquait de poil/alors qu’il s’agissait d’une simple lecture qui/manquait de poil etc. »

    La platitude est la rampe de lancement des poèmes afin qu’ils décollent, exercice toujours périlleux, de faire poème avec le plat pays qu’est le quotidien domestique. C’est réussi. On sourit. Le tour de force est réussi quand on sourit où ce n’est pas drôle, comme Pierre Desproges savait nous faire rire jaune avec des choses graves. Parfois, on cherche le drôle pour sourire, et on ne le trouve pas, le poème semble tomber à plat, or ce sont les petites incartades de gravité glissées comme peau de bananes verbales.
    Poésie insolente, tonique, qui vous fiche une saine petite claque.

    Jean-Pascal Dubost


    1 En dehors de l’ouvrage ici recensé :
    Hélène Dassavray, On ne connaît jamais la distance exacte entre soi et la rive
    Mireille Disdero, Écrits sans papiers. Pour la route entre Marrakesh et Marseille
    René Lovy et Thomas Vinau, p(H)ommes de terre

     

    Maison. Poésies domestiques d'Emanuel Campo, collection Sur le billot, éditions la Boucherie littéraire, 60 pages, décembre 2015, 12 €


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    Aller écouter Emanuel Campo en lecture


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    Le pluridisciplinaire Patrice Maltaverne livre sur son blog de chroniques poétiques : Poésie chronique ta malle son ressenti à la lecture de Lame de fond de Marlène Tissot. (ici vous pourrez lire les 5 premières pages)

    D'un échange avec lui sur la réception et la lecture du recueil il dit ces mots qui me touchent (et auxquels j'adhère) :

    Tu penses que j'allais pas mettre longtemps à dévorer le Marlène Tissot ! Sitôt reçu, sitôt lu.  Que veux-tu, ce qu'elle écrit, elle l'écrit avec naturel et ça, ça vaut tout l'or du monde...

     
     
    Voici le dernier livre de Marlène Tissot, publié par les éditions "la Boucherie littéraire", le cinquième de sa collection "Sur le billot".
    Il s'agit d'une suite de proses consacrées au souvenir d'un proche disparu. Ce souvenir est prétexte à un retour dans les lieux (jusque dans la maison) où ce disparu a vécu. C'est dire combien le souvenir s'incarne au maximum. L'attitude de la narratrice pourrait être de le rejeter, de lui ôter sa substance, pour s'en détacher au plus vite. Eh bien non. C'est ce que j'ai particulièrement apprécié dans ce livre, cette façon de se sauver en se précipitant là où est le manque.
    La mer de Bretagne est également très présente dans cette "lame de fond", et c'est elle qui nourrit nombre d'images. C'est qu'il en faut du courage, parfois, pour se maintenir au dessus de la ligne de flottaison.
    Le style de Marlène Tissot restitue avec finesse les subtils atermoiements de l'âme. Il est connu pour cela déjà !
     
    Extrait de "Lame de fond" :
     
    "Une serveuse assise à la terrasse d'un restaurant vide. Ce n'est pas encore l'heure, plus la saison touristique, pas le week-end. Il n'y a pas grand chose à faire en cet instant, alors elle vient s'asseoir là et regarder la mer. Une veste d'homme posée sur ses épaules étroites. Une petite robe noire et un tablier blanc. J'essaie d'imaginer ce que verraient tes yeux s'ils étaient à la place des miens. Est-ce que tu la trouverais belle ? Tu disais que toutes les femmes étaient belles, sauf celles qui n'avaient pas de cœur".

    Patrice Maltaverne,

    17 mars 2016

     

    Lame de Fond de Marlène Tissot, collection Sur le billot, éditions la Boucherie littéraire,

    74 pages, 7 mars 2016, 12 euros. 

    Disponible sur commande dans toutes les bonnes librairies

     

     Il est important d'aller plus loin et découvrir la nébuleuse poétique de Patrice Maltaverne.

    Né en 1971 à Nevers, Patrice Maltaverne a publié des poèmes dans une trentaine de revues ou sites littéraires. Il est passionné de poésie... On s'en doute. Et il ne manque pas de corde à son arc.

    En effet, il anime la revue Traction-brabant depuis janvier 2004. Il rédige des chroniques de lectures pour le « Mensuel littéraire et poétique » et la revue « Diérèse » notamment. Il anime également un blog de chroniques poétiques : Poésie chronique ta malle. Par ailleurs, il tient une revue de presse des revues de poésie sur le net qu'il a nommé : C'est vous parce que c'est bien.

    Et comme si cela ne suffisait pas, en plus de tout cela et d'une active vie professionnelle il dirige également les éditions du Citron gare qu'il a fondé en 2012.


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    Tu me racontais la tempête qui envoyait valdinguer les rochers de la Pointe du Raz. Les cadavres échoués sur la baie des Trépassés. Et je m’en foutais de savoir si tout ça c’était vrai ou bien si t’inventais. Je t’écoutais. J’en voulais toujours plus de tes histoires de vieux loup de mer.

    C’était il y a combien de temps tout ça, dis-moi ? Quand les crabes ramenés du port cavalaient dans la petite cour bordélique. Que je nettoyais mes pieds pleins de sable sous le robinet. Quand je collectionnais les coquillages et que j’allais me gaver de crêpes chezAlberte. Elle est encore en vie, Alberte.

    Il paraît qu’elle n’y voit plus grand-chose. Son fils la promène le dimanche sur un fauteuil à roues. Il l’emmène écouter la mer.

    Il y a Maurice aussi. Ton ami de toujours. Je lui rendrai visite. Nous parlerons de toi. Il me demandera si je me rappelle de ceci, de cela. Oui, je me souviens. Et pourtant, tout me semble si irréel. Est-ce que c’était vraiment moi ? Est-ce que j’ai eu plusieurs vies à l’intérieur de ma vie ?

     

    Marée amarrée haute. Lame de fond : nn déferlement infiniment humain

     

     Jusqu'à demain soir, foi au cachet de la poste... Pour souscrire, nous soutenir dans notre démarche éditoriale & nous encourager à poursuivre. Merci.

     

    Télécharger la « Souscription_Lame_de_fond.pdf »

     

    Lame de fond de Marlène Tissot, collection Sur le billot, éditions la Boucherie littéraire,

    74 pages, 7 mars 2016, 12 euros. 

     


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    Lame de fond de Marlène Tissot est actuellement en cous d'impression "sous les presses" de la Maison de la poésie d'Amay en Belgique. J'en profite pour remercier le travail formidable mené par son directeur David Gionnani et son équipe à l'imprimerie : Karin, Fabian et Arlette.

    Le 7 mars, il sera possible de commander en librairie pour les uns et pour ceux qui veulent nous soutenir, le livre est encore disponible en souscription jusqu'au 4 mars.

    En attendant, pour vous mettre l'eau à la bouche, je vous propose de découvrir les cinq premières page de ce recueil.

     

    Dans la chambre d’hôpital, les machines se sont mises à biper, affolées comme des mouettes au cul d’un chalutier. Des blouses blanches et des stéthoscopes se sont lancés à ta poursuite, mais tu étais déjà loin. Matin d’hiver, cinq heures trente. Tu venais de prendre le large, cap sur l’éternité.

     

    L’hiver a emprisonné ton absence dans sa glace. Rien ne bougeait. Le silence neigeait, lourd et lent. Nos sourires fragiles comme la surface d’un lac gelé sous des pas imprudents. La sensation lancinante de devenir givrée.

     

     

    Verbiage des moineaux derrière les volets clos. Matin de printemps, cinq heures trente. Ton absence fait trop de bruit. Il manque ta voix.

    Démêler les filets, sortir mon cœur de sa léthargie. Il est temps de te réinventer, de larguer les amarres.

     

     

     

     

     

     

    Remonter le temps comme on grimpe à une échelle boiteuse. Là-haut, aucune lune à décrocher. Les étoiles éternuent. Ta poussière est poivrée. J’empoche boussole et compas, enfile un vieux ciré, et mets les voiles pour une expédition à durée indéterminée sur les flots des souvenirs de toi.

     

     

     

     

     

     

     

     

    Un voyage immobile ne suffira pas à écoper ma peine. Je dois partir vraiment. Voguer, dériver. Et tant pis pour les tempêtes. Partir à ta recherche ou peut-être à la mienne. Il y a si longtemps que je me suis perdue de vue. La réalité de mes contours comme estompée. Ce drôle d’habit de chair me laisse presque nue. J’existe sans exister tout à fait. Comme si la vie ne me tenait plus dans ses bras. J’aimerais fleurir de nouveau en marchant dans tes pas, reprendre forme humaine, renaître de tes cendres.

     

     

    Découvrez les 5 premières page de : "Lame de fond" de Marlène TissotPour découvrir la suite et vous assurez de recevoir le livre avant tout le monde, merci de soutenir nos éditions en souscrivant.

    La souscription n'est pas une simple précommande.

    Mais bel et bien un soutien financier qui nous permet de constituer le capital nécessaire pour financer les frais d'impression.

    Alors n'hésitez pas à relayer d'îlots en archipels le bulletin de souscription téléchargeable ci-dessous. Merci. (valable jusqu'au 4 mars et non le 5 comme indiqué sur le bulletin)

     

    Télécharger la « Souscription_Lame_de_fond.pdf »

     

    Lame de fond de Marlène Tissot, collection Sur le billot,

    éditions la Boucherie littéraire, 74 pages, 7 mars 2016, 12 euros. 





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